"C'était il y a longtemps, dans une petite ville tranquille où tout le monde se saluait, avant.
Dans un pays de collines parfaites et de vergers aux douces toisons de printemps.
C'était au fond du jardin de mon père, qui avait été celui de son père et de son grand-père.
C'était pourtant à une heure matinale inhabituelle, au milieu des pommiers frôlant le ciel encore pâle de la promesse de leurs fleurs prêtes à nouer en fruits.
Quelque chose m'avait alerté. Un bruit de pas.
Je m'étais levé. J'avais vu la large silhouette de mon père se faufiler vers le fond du jardin.
¨Pourquoi s'occuper de ses ruches si tôt ?"
***
(...)
"Mais on était au temps des mots à voix basse et mon père avait plus important à faire,
ce matin-là, que de soigner ses abeilles"....
(...)
"Quel oiseau lève-tôt embrouillait leurs paroles par instant ?...
Je ne m'en souviens pas.
Je me souviens seulement que l'heure était devenue grave tout à coup.
Qu'elle pesait lourd dans leur bouche.
Que les mots s'accrochaient à leurs lèvres comme pris dans les dents d'un peigne.
J'avais encore dans le corps
la légèreté de l'enfance.
Mais d'un coup je me remplissais
du poids de l'homme
et de ses supplices."
***
"Le soleil a atteint le faîte du rucher puis mon front.
L'oiseau tôt levé s'est envolé en faisant s'égoutter les larmes du bouleau, laissant place nette à la tourterelle".
***
"C'était il y a longtemps et pourtant si près du temps d'aujourd'hui, tant les hommes ne cessent de redoubler leurs classes de malheur, toujours recalés à l'épreuve de bienveillance et d'amour.
La même histoire de haine et de rejets, de refus de la différence, de territoires et d'orgueil, de pouvoir, recommence inlassablement autour de nous, faite de l'alphabet de violence et de souffrance dans trop de langues différentes.
S'il fallait la dresser, elle serait longue la liste des conflits qui continuent de séparer des amis de toujours tout autour de la terre !"
Anne-Lise Grobéty
Le temps des mots à voix basse
Bonsoir chère Den, je viens de lire le merveilleux texte d'Anne-Lise Grobety. C'est si bien écrit et raconté que cela donne l'impression d'être à ses côtés. Tout cela fait aussi revivre nos souvenirs d'enfance.
RépondreSupprimerMerci Den pour ce très beau billet et tes photos.
Je t'embrasse et te souhaite un tout bon week-end ensoleillé.
Des mots du côté de notre enfance, effectivement Denise.... un livre qui prône le devoir de mémoire, l'amitié,... "c'était il y a longtemps et pourtant si près du temps d'aujourd'hui, tant les hommes ne cessent de redoubler leurs classes de malheurs, toujours recalés à l'épreuve de bienveillance et d'amour".... thème malheureusement illustré ces derniers jours dans l'actualité.... merci pour tes passages dans mes allées... Je t'embrasse. Den
RépondreSupprimerTrès belle page qui parle à chacun de nous ...qui parle de ce qui fait le parfum de la vie...l' Amour .
RépondreSupprimerPourquoi cela ne dure pas ...pourquoi les hommes ne comprennent pas ...pourquoi ...?
Je te dis bonsoir jolie madame et repars avec en tête la chanson de Félix Leclerc "quand les hommes vivrons d' amour ..." C' est pourtant pas compliqué...!!
Pourquoi.... pourquoi, .... ah ! si on savait..... !! merci ma chère Mathilde de te promener dans les allées de mes mots et de permettre de continuer la réflexion... Bonne soirée.. avec dans la tête la chanson de Félix Leclerc... "quand les hommes..... " bisous d'amitié.
SupprimerDen
Magnifique texte; tu nous parles un peu de ce livre? J'en aime le ton.......................ET le sujet!
RépondreSupprimerAs-tu lu les souvenirs de David Foenkinos? Oui, celui-là même qui no us émeut tant avec son dernier livre: Charlotte!
Un très beau (petit) livre dont l'action se situe dans les années 1930, en Allemagne.... à lire et à relire tant il est fort... nous parle du devoir de mémoire et de l'amitié.
SupprimerIl dit les choses à la première personne.
Le narrateur est un enfant lié à Oskar, son copain, ...par des sentiments profonds comme leurs pères respectifs l'étaient eux aussi à leur âge...
Le bonheur est posé là simplement dans cette enfance, leur enfance,.... jusqu'au jour où leur vie bascule, jusqu'au déchirement, l'abandon, l'arrachement, l'ignorance, jusqu'au temps des mots à voix base.
A partir de cet instant les choses changent progressivement... on sent des sentiments haineux.. que l'on imagine seulement... une incompréhension s'installe,... mais juste effleurée... à imaginer.seulement par le lecteur... beaucoup de pudeur... Anne-Lise Grobéty est appelée avec justesse "la pianiste des mots"...tant elle choisit son écriture, cette ambiance très particulière ... qui nous rappelle....
surtout ne pas oublier le temps d'avant et être tolérant...
"j'ai appris que rien en apparence n'aura changé autour de nous au moment où se fermera la frontière entre le temps d'avant et le temps de la barbarie. Et qu'il nous faut être autant plus vigilants à tout heure pour dire ce qui nous semble bon et ce qui l' est moins"...
Je te conseille (si je peux !) de lire Anne-Lise Grobéty, je suis sûre que tu l'aimeras....
***
Non, je n'ai pas lu le livre de souvenirs de David Foenkinos ! je vais essayer de m'y atteler... mais je manque tant de temps.....
Je te souhaite un doux dimanche en famille, en solidaire.......! ou comme tu aimeras....
Den
Bonjour chère Den, ton nouveau bandeau fleuri me plaît beaucoup. Profitons encore des belles fleurs, c'est si doux.
RépondreSupprimerBisous et je te souhaite un bon week-end :-)
Quand on entre dans la nouvelle saison automnale, encore que jusqu'à présent, chez nous, on n'a pas trop eu à se plaindre !! ....regarder des teintes colorées rosées réchauffent le coeur qui entrera bientôt en hibernation... enfin, peut-être !! merci Denise pour ta douceur sur la page, et à mon tour de te souhaiter un agréable week-end..
RépondreSupprimerBisous.
Den
"toujours recalés à l'épreuve de bienveillance et d'amour" et pourtant il faut continuer d'y croire et d'avancer dans la bienveillance et l'amour, ne jamais se laisser détourner par tous ces évènements factuels et terribles qui jalonnent notre quotidien. Garder tout au fond de soi l'espérance, l'empathie avec ses semblables, conserver sa capacité d'indignation, de révolte contre l'horreur. Bises ma chère Den, j'espère que tu vas bien. Heureuse d'être revenue en ts mots.
RépondreSupprimerMerci ma chère Malou ... heureuse de te retrouver ici, et permettre la continuation de la réflexion.. tes mots..
Supprimer...pas très présente sur la blogosphère en ce moment.. je n'oublie pas mes Âmi(e)s de l'Etoile.... me manque du temps fort occupé.... toutefois, je vais bien... contente de conserver la forme, malgré tout..
Je t'en brasse ce matin, sous la pluie estompée.. après un très gros orage.......
Je te souhaite une douce journée.
Bisous.
Den