mercredi 29 juin 2016

*Je ne sais plus si c'est ma joie..............





Je ne sais plus si c'est ma joie 
Si c'est ma peine
Si dimanche commence ou finit la semaine
Il est trop tard
On parle de l'amour
Et toujours sans savoir
Les mots s'envolent
Il y a des baisers coulés dans les paroles
Des larmes sur la main
Un grand ciel de printemps au fond du lendemain
Un grand soleil
Une nuit mon coeur qui bat trop fort
Et je me réveille
 Les ailes des oiseaux sur la gorge du vent
Tous ces matins perdus
Ces haines à renaître
Et ceux qui ne voudront jamais me reconnaître.

*

C'est bien toi 
Je ne t'ai jamais vu
Et je te reconnais
Tu es celui que j'attendais
Prends la lampe
Appuie-toi sur mon bras
Il n'y a pas de rampe
Monte encore plus haut
Tu sais
On n'est jamais trop près du ciel

*

Ne plus penser à rien
N"'être là pour personne
Des fleurs sur le chemin
Une cloche qui sonne
Ce visage qui brûle à portée de la main
Et si tu veux mourir
Il fera jour demain

*


René-Guy Cadou, Morte Saison, 1940

*


mardi 28 juin 2016

*"Les ruines du ciel"...................



(...)

Quelques extraits de "les ruines du ciel" 
de Christian Bobin
que j'aime...
et vous ?

*****

Lumière, Lampe, Lampe De Chevet

"Enfant je ne sortais pas dans les rues du Creusot.
Elles étaient des rivières qui menaient à l'usine-océan.
Je restais dans ma chambre,  à lire.
Je vivais dans un monastère dont aucun roi n'aurait pu abattre les murs de papier.
Nous prenons nos métiers, nos visages et nos puissances dans l'enfance.
Nous n'en changeons plus ensuite.

Le soleil se couchait au-dessus de la montagne des boulets.
Son globe orangé a disparu en une seconde.
Lire et écrire sont deux points de résistance à l'absolutisme du monde. 
On peut en trouver d'autres, comme cette gratitude qui accompagne la vue d'un soleil couchant, 
la joie éternelle de se sentir mortel".

Coucher De Soleil, Ciel, Orange, Soleil

"Je ne suis pas fait pour ce monde. 
J'espère que je serai fait pour l'autre"


(...)


*****. 

"L'odeur de la jacinthe - si forte qu'elle m'arrache au  sortilège de ma lecture pour me faire admirer  la grâce de son agonie".


Jacinthe, Hyacinthus Orientalis

"Les parfums des fleurs sont les paroles d'un autre monde".

Fleurs, Bouquet, Printemps

"La mort a pris mon père mais elle a oublié son sourire comme un cambrioleur surpris s'enfuit en abandonnant une partie de son butin". 

"Dieu accessible au coeur et non à la raison est la plus belle rose sauvage  du rosier de Pont Royal."



Rose, Fleurs, Fleurs Sauvages, Nature

(...)


"Les fleurs des champs sont des saintes qui s'arrachent au néant et s'élancent vers le ciel de toute la force de leurs tiges".

Fleur, Bleu, Prairie


(...)


"Les livres sont la résidence secondaire de l'âme. 
Quand elle pousse les volets de papier  contre le mur, une lumière entre partout dans la pièce".


Coeur, L'Amour, Livre, Lecture, Mots

(...)


"Les livres sont des cloîtres de papier.
On peut  s'y promener jour et nuit 
Les jardins au centre des cloîtres symbolisent le paradis. 
Avec le temps je suis devenu jardinier au paradis, passant chaque matin un râteau d'encre sur une étroite terre de papier blanc. 
Il importe que tout soit harmonieux : le paradis n'est pas fait pour qu'on y vive mais pour qu'on le contemple
et que, d'un seul coup d'oeil sur lui, l'âme soit réconfortée".

Bible, Psaume, Livre, Ouverte

(...)



lundi 27 juin 2016

Cezanne, aquarelliste...




Cabanon

Le Cabanon de Jourdan
1906

Paul Cezanne
Aquarelle

(réf. sur le web)

*****

"Chez Cezanne (1) l'aquarelle ne constitue pas une étape préliminaire conduisant  au tableau achevé.
Avec Cezanne cette technique acquiert une autonomie et un statut à part entière.
Au même titre que ses peintures à l'huile, ses aquarelles s'inscrivent dans une recherche artistique jalonnée d'études. Cezanne lui-même qualifiait sa peinture d'étude plutôt que de tableau sans nullement restreindre ce vocable au dessin préparatoire (esquisse, croquis, etc.....).

L'écrivain Maurice Blanchot dans "Le livre à venir" affirme 

"Ce qui attire l'écrivain, ce qui ébranle l'artiste, ce n'est pas directement l'oeuvre, c'est sa recherche, le mouvement qui y conduit, c'est l'approche de ce qui rend l'oeuvre possible : l'art, la littérature et ce que dissimulent ces deux mots. De là que le peintre, à un tableau, préfère les divers états de ce tableau.
Et l'écrivain souvent désire n'achever presque rien, laissant à l'état de fragments cent récits qui ont eu l'intérêt de le conduire à un certain point qu'il doit abandonner pour essayer d'aller au-delà de ce point (...)
toute mon oeuvre n'est qu'un exercice"(.....)"

Paul Cezanne
Aquarelliste

de Jacky Chabert
(dans sa préface, p. 12)
Editions Desbaumes

*****

(1) l'auteur du livre précise "à propos de l'orthographie Cezanne"
"Le lecteur remarquera l'absence d'accent sur le e. Ce faisant, nous nous conformons à la pratique du peintre, de sa famille et de ses descendants.
Les actes officiels en sont le témoignage".



dimanche 26 juin 2016

*heureux dimanche...

Ont Augmenté De, Fleur, Rose Rouge



"C'est en croyant aux roses qu'on les fait éclore".

Anatole France

*****

Je vous souhaite un heureux dimanche,
Et vous embrasse.


Den


*****




dimanche 19 juin 2016

Bonne fête des Papas !


Rose, Floraux, Plantes, Naturelles


















Un heureux dimanche
Et une bonne fête à tous les Papas !

Den



dimanche 12 juin 2016

Millième billet......



Romarin, Fleur, Provence, Violet, Vert


Millième billet que je vous offre
Avec ce brin de romarin....

En ce dimanche tout réjoui

Reconnaissant

De vous avoir en lecture....

Je vous offre cette 1000ème correspondance
Avec les mots si poétiques, et  que j'aime tant,
De René Frégni......


Merci en coeur,
Pour tous ces partages,
Vos très-ors, vos douces-heures
Respirés dans le cil-anse de la page
Qui mêle harmonie et accordance,
Et éclaire  le choeur immense-aimant
......


Heureux dimanche 
A chacune en particulier,  
A chacun d'entre vous,

Sous un sOleil au regard légèrement voilé,
Mais bien présent dans mon inter-rieur.

Je vous en brasse
Fleurie,
Ici,
Dans l'infinitude de ce jour,
En cet anse-temps.

Den


*****


Provence, Lumière, Couleur, Paysage


(....)



"Il m'arrive souvent de partir le matin vers les collines que je vois de ma terrasse et qui m'apportent en été l'haleine brûlante de la résine.

Pour sortir de cette ville ronde, je passe sous une tour dont l'oeil blanc d'une horloge surveille une rue rétrécie de cagettes de légumes, de guéridons de bistrots et de cartes postales.

Je suis tout de suite dans des petits vergers qui grimpent en terrasses vers des pins noirs d'Autriche.
Octobre donne ses premiers coups de pinceau rouge sur les plus hautes branches des cerisiers. Je frôle une ferme tapie dans l'ombre d'or de trois tilleuls. Et je suis seul sur la pierraille des collines, dans l'odeur des cades, du thym et du genévrier.

A partir de là ça monte raide vers un petit col qu'on appelle la Mort d'Imbert et qu'on atteint toujours le dos trempé de sueur. Cinq minutes après ma chemise est sèche, le chemin des crêtes reçoit tous les vents. La pluie arrive d'Italie, le vent du nord apporte la lumière.

Droit devant, le sommet des Alpes étincelle d'éboulis ou des premières neiges nocturnes. De chaque côté, la vallée de la Durance, sur ma droite, ou celle du Largue où j'ai vécu, enfant, les plus beaux jours de ma vie. Le cuivre des chênes éclaire de grands pans de forêt dans l'obscurité des pins.

Je m'assois toujours sur le même rocher qui s'avance sur le vide, sauf lorsque le mistral vient de passer sur le dos glacé de Lure. Pendant des heures je regarde cette vallée, cette rivière, en bas, qui brille un instant entre les saules, longe un champ de maïs, passe sous un petit pont de pierre, frôle une poste fermée et disparaît sous les feuillages. Cette rivière où je me suis tant baigné, où j'ai appris à pêcher à la main sous les branchages, en frissonnant d'appréhension dès que je sentais entre mes doigts glisser le ventre visqueux et froid d'un poisson.

Provence, Lumière, Couleur, Paysage

Je suis seul au milieu des collines, dans ce beau silence d'octobre, et je regarde mon enfance. La citadelle de Forcalquier posée sur une assiette de brume, au loin, et de promontoire en éminence, les remparts dorés de chaque village, Mane, Saint-Maime, Dauphin, les dômes blancs d'un observatoire qui ressemblent à des oeufs de dinosaures posés sur les chênes verts.

Les enfants sont dans les écoles, les employés dans les bureaux, les ouvriers au bord des routes ou sur un échafaudage, des gens sont assis dans des salles d'attente, dans des cafés, d'autres poussent des caddies dans de longs couloirs de lessive, des femmes somnolent en attendant le client dans toutes les boutiques du monde, ma fille construit sa vie dans une ville où je vais de moins en moins, parce que je m'y sens vieux. Moi je regarde mon enfance, dans un grand silence bleu, avec cet oeil droit qui s'en va doucement et qui m'a tant aidé à attraper la vie.

Provence, France, Nature, Paysage

Le soir je redescends vers Manosque, je passe sous les ruines du château de Montaigu qui servit de repaire à de redoutables bandits de grand chemin, dans une époque de chevaux et de pièces d'or. Je dépasse dans le vallon de Gaude les anciens puits d'une mine engloutie et j'aperçois les portes rondes de la ville. Les pies et les corneilles s'abattent sur les toits, font quelques bonds inquiets, griffent les tuiles, scrutent chaque fenêtre, chaque cheminée et se glissent dans le feuillage encore vert des platanes, au-dessus de toutes les petites places déjà plongées dans le silence et la nuit".   (...)


Je me souviens de tous vos rêves
René Frégni


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mercredi 8 juin 2016

*L'enfant au toton



L'enfant au toton, 1738, Jean Siméon Chardin, Paris, Musée du Louvre

L'enfant au toton
Jean-Baptiste Siméon Chardin
1738
Huile sur toile
67 cm x 76 cm
Musée du Louvre


*****

L'ENFANT  est au centre de toutes les préoccupations. 
Il est perçu jusqu'alors comme un adulte miniature, un petit animal.

On est au début du XVIIIème siècle. 

Ce siècle dit des lumières lui accorde enfin,
une identité pleine et entière.

Pédagogues, philanthropes, médecins et savants, artistes et philosophes l'auscultent sous toutes les faces.

Et le peintre Chardin devient le meilleur promoteur du sentiment familial qui grandit parallèlement.

Place, donc, à un nouveau genre : le portrait d'enfant sensible et humain. Exquis.

Non plus du seul petit Jésus ou du rejeton d'une lignée familiale...
Connu jusque là pour la peinture d'animaux et de fruits, Chardin  va être propulsé avec ses nouveaux portraits, haut et loin,  et il lui assureront   ainsi la prospérité.

"L'enfant au toton", c'est Auguste-Gabriel, le fils d'un joaillier et banquier Charles Godefroy.
Il a 10 ans, un magnifique visage qui est devenu au fil du temps le porte-étendard de "l'Enfant des Lumières"
Issue de la haute bourgeoisie, sa famille  avait un goût prononcé pour les Arts.

Qu'est ce toton ?
Que regarde l'enfant ?
C'est une petite toupie qu'il vient de lancer et qui virevolte sur le bureau.
Tel un dé il est jeté sur le plateau  et chaque face est marquée d'une lettre :
A : "reçois"
D : "donne"
P : "pose"
et T : "tout" 'prends toutes les prises.

A l'origine, Chardin a utilisé ce jouet afin que son petit modèle conserve la pose des heures durant, mais finalement  le toton est devenu la pièce essentielle de sa toile, transformant son portrait en véritable scène de jeux.
Un enfant dans son univers quotidien...
***

Le décor est simple, presque austère.
Coiffure et habit sont tirés droit. 
Il s'agit bien là d'une famille aristocratique scrutée par l'artiste comme il aime, jour après jour....

Pourquoi la plume et l'encrier ?
Un tiroir entrouvert d'une travailleuse laisse deviner un porte-mine.
L'enfant joue et a délaissé en cet instant livres, plume, encrier, papier...
Nature devenue morte...

***

Pourquoi ce  léger sourire au bord des lèvres ?
L'enfant est dans son jeu, plongé dans son univers intérieur, celui des rêveries, et de l'imaginaire.

Avec ce tableau intemporel Chardin évoque joliment le monde de l'enfance représenté ici, figé à jamais,  comme les peintres flamands, comme Vermeer, Rembrandt

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L'ombre et la lumière...
Le fond de la toile est brun, monochrome, neutre..
La pièce est plongée dans la pénombre.
La lumière est en haut à gauche du tableau..
Un savant clair-obscur ... la marque du peintre.
L'harmonie de bruns et de blancs enveloppe la scène d'une lumière chaude qui caresse le visage de l'enfant.
Chardin, le maître des couleurs, nullement mélangées mais appliquées en couches épaisses aux contours flous...
Le peintre écrit : "on se sert des couleurs mais on peint avec le sentiment"..
Son credo.

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Pourquoi  ce tableau semble-t-il   figé ?
.....Il  n'est pas figé dans une pose traditionnelle
C'est le caractère épuré du décor qui produit cet effet.
Le seul élément dynamique du tableau est le mouvement de la toupie, du toton, ce  qui le rend bien vivant.



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dimanche 5 juin 2016

*Nous écoutions septembre....



Iris Jaune, Iris Des Garrigues

J'ai commencé ce cahier en septembre, comme je le fais depuis plus de trente ans, après les grosses chaleurs de l'été et surtout lorsque ma fille retournait à l'école et que je restais seul dans le silence de notre appartement. J'ai toujours détesté l'école depuis le premier jour, je n'aime que la lumière des champs.

A l'époque nous rentrions à l'école le 1er octobre, et ce mot, octobre, était sombre et froid. Il le demeure. Septembre est un mot très doux, il glisse comme une rivière, dans une plaine encore toute dorée où les poussières des moissons ont disparu.

Mon père prenait ses congés en septembre pour aller chasser et nous passions ce mois dans le petit village de Saint-Maime, au coeur des Basses-Alpes. J'aurais aimé qu'il dure éternellement.

Chasse, Chasseur, Fusil, Maquis

Il faisait encore nuit quand il me réveillait. J'attrapais mes vêtements sur le dossier de la chaise et nous filions.
Nous escaladions les ruelles du village qui sentaient la cave, le coulis de tomates et le poulailler.



France, Provence, L'Architecture, Europe


Médiéval, Village, Ruelle

Très vite nous atteignions une chapelle recouverte de lauzes et pleine de pigeons, nous contournions ce que l'on appelait le château, qui n'était plus qu'un moignon de tour fortifiée, toutes les pierres de taille ayant servi à construire le village, deux cents mètres plus bas. Nous étions sur la crête d'un éperon rocheux.

A notre gauche, là-bas dessous, la nuit n'était éclairée que par les fleurs blanches des tombes, sous les cyprès du petit cimetière. Devant nous, très loin, du côté du plateau de Valensole, le ciel était vert.

Provence, Lavande, Violet, Pourpre

Les aubes sont très fraîches en septembre, la brume reste longtemps immobile au fond des vallons et encore plus laiteuse le long des rivières. Il y en avait deux ici, la Laye et le Largue, où j'allais pêcher et me baigner. Les après-midi sont encore torrides, au milieu des collines.

Arbre Mort, Chêne, Garrigue, Buis



France, Provence, Berger, Abri Pierres

On entendait sous la brume la cloche d'un troupeau que l'on ne voyait pas. On retrouvait un peu plus loin le chemin des vignes. C'était une suite de petites vignes, pas plus grandes que la main, à flanc de coteau. Chacune avait son petit cabanon en pierres sèches recouvert de trois tuiles recuites par les étés et son grand fût rouillé pour recueillir l'eau de pluie.

Toit, Au Sud De La France

Je pensais toujours que le soleil ne sortirait jamais tant le froid piquait mes jambes nues et soudain il éclairait les plus hauts rochers et glissait vers nous sur les raies des vigne étincelantes de rosée. Un peu plus  tard, toute la vallée s'ouvrait sur notre droite et l'on découvrait les sombres allées de marronniers qui dissimulaient l'ancienne petite gare.

Nous suivions un bon moment ce chemin quand mon père commençais à transpirer dans sa veste de treillis, nous nous arrêtions pour déjeuner. 

Ciste, Fleur, Pourpre, Rose

Ces petites vignes aux grappes violettes, aussi dures que les plombs dans la cartouche, donnaient un vin âpre et râpeux, que faisaient semblant d'apprécier les propriétaires de tous ces cabanons. Mon père avait repéré deux ou trois treilles de muscat ou de clairette.  Il appuyait son fusil contre un muret, coupait deux belles grappes noires ou blondes avec son Opinel et on s'installait dans l'herbe, entre deux raies de vignes. C'était pour nous deux le meilleur moment de la matinée.

Baies De Vin, Raisins, Baies, Bleu


Raisins, Nature, Vignes, Vin, Fruit



Raisins, Vin, Vigne, Viticulture


Il tirait de son carnier deux tommes de chèvre recouvertes de sarriette,


Fromage De Chèvre, Ciboulette
Fromage De Chèvre, Cibouletteun morceau de pain qu'il partageait, et à part peut-être de ramener un beau lièvre de cinq kilos, rien n'égalait cet instant magique.  Une tomme de chèvre, une grappe de muscat et un bout de pain, juste avant l'automne, dans le silence doré des collines, si loin de l'odeur de la craie, de l'encre, de la peur physique d'être interrogé. Mon père ne disait pas un mot. Nous écoutions septembre. Mon père ne m'a jamais dit un mot. Nous marchions en silence, nous mangions en silence et chacun faisait sa vie.



Bancs, Pique-Nique, Table

Je me souviens de tous vos rêves.
René Frégni


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