Je pars souvent de bonne heure, sur une petite route qui s'enfonce dans une vallée. Je marche sous des peupliers d'or au bord d'une rivière.
Puis la route s'élève à flanc de coteau. Certains vergers rougissent déjà,
il y a dans l'air une odeur de coings, de bois mouillés, la cloche d'un troupeau.
Puis la route s'élève à flanc de coteau. Certains vergers rougissent déjà,
il y a dans l'air une odeur de coings, de bois mouillés, la cloche d'un troupeau.
Je traverse deux ou trois villages accrochés à la pente, avec leur fontaine, leurs roses trémières qui regardent par-dessus les murs, le petit cimetière un peu plus haut sous la rouille des hêtres.
J'entends une hache, un chien, un fusil qui claque, le cri rauque des corbeaux. Très loin dans la plaine toutes les villes changent, se couvrent de poussière, disparaissent sous des brumes ocre et chimiques qui piquent les yeux. J'aime retrouver mon enfance dans ces petites vallées aussi fraîches que des fontaines.
Vers midi j'entre dans une auberge ou le bistrot de la route : le Relais des Gorges, le Bar des Boulomanes ou tout simplement chez Ginette.
Une femme sort de la cuisine, et s'avance vers moi. Toutes les femmes qui sont venues vers moi s'essuyaient les mains avec un torchon.
Les touristes sont partis, on peut se servir d'un torchon. Elles sont très brunes ou rousses, et en cette saison on aperçoit, à travers leur chemise légère, la fleur obscure de leurs seins. Elles glissent derrière le comptoir et lorsqu'elles lèvent leurs bras pour arranger leurs cheveux, je vois leurs belles aisselles pâles que l'été n'a pas touchées. Elles suivent mon regard avec gourmandise.
On fait un brin de causette. Elles peuvent être très fortes sur de fines chevilles ou belles comme des fruits. La malice et l'ennui dessinent leur bouche. Une odeur de daube ou de soupe au pistou arrive de la cuisine.
Vers le milieu de l'après-midi, après le plat du jour et un ou deux cafés,
je reprends la route vers d'autres vallées, d'autres d'autres villages, d'autres clochers. Je ne rentre qu'à la nuit avec les premiers gémissements de la forêt, en pensant à toutes ces belles poitrines qui m'attendent dans des hameaux où personne ne va, dès qu'on entre dans l'arrière-saison. Manger en les regardant se balancer souplement me suffit.
je reprends la route vers d'autres vallées, d'autres d'autres villages, d'autres clochers. Je ne rentre qu'à la nuit avec les premiers gémissements de la forêt, en pensant à toutes ces belles poitrines qui m'attendent dans des hameaux où personne ne va, dès qu'on entre dans l'arrière-saison. Manger en les regardant se balancer souplement me suffit.
René Frégni
Je me souviens de tous vos rêves
*****
*****
Quelle belle écriture ! ...
RépondreSupprimerJ'ai vécu cette balade comme on vit un frisson.
Merci Den, c'est très beau.
¸¸.•*¨*• ☆
Magnifique écriture en effet... un grand écrivain René Frégni... si proche de nos poètes provençaux... Beau dimanche à toi Célestine.... merci pour ta fidélité.
RépondreSupprimerBisou amical.
Den
Je suis justement en train de le lire..... C'est beau.
RépondreSupprimerTu en parlais dans un de tes billets ! Je sais que tu apprécies René Frégni...
Supprimerbonne lecture, encore...
Douce soirée Bonheur du Jour.
Den
Bonsoir chère Den, j'ai lu ce texte comme on mange un dessert... quelle délicieuse lecture, un grand merci.
RépondreSupprimerJe te souhaite une toute belle soirée avec mes amitiés.
Gros bisous ♥
...Offert comme une gourmandise en ce dimanche... J'aime beaucoup les mots de René Frégni...heureuse que tu aimes cet extrait..
RépondreSupprimerMes amitiés en retour, ma chère Denise...
Une belle semaine à venir.
Den
Quel beau billet, superbe! Bise et un agréable lundi tout en douceur!
RépondreSupprimerMerci Maria-Lina, avec un peu de retard.
SupprimerJe t'embrasse en ce début de soirée.
Den
Un vrai délice que la lecture de ce beau récit! On a l'impression que les mots coulent d'eux-même, suivent leur chemin, sans attendre, la vie grouille! je ne sais, mais je pensais à Pagnol.
RépondreSupprimerBelle journée Den
Je viens de lire la biographie de rené Frégni, elle est impressionnante, son parcours est impressionnant. Merci pour la découverte Den.
RépondreSupprimerJe connaissais un peu la vie de René Frégni, mais j'ai découvert certains points de détail évoqués "Dans la Grande Librairie".... impressionnant écrivain...
Supprimerheureuse que vous le découvriez... ses mots sont magnifiques...
Den
Merci bisak,..de chez Célestine, jusqu'à chez moi, je vous retrouve ici...
RépondreSupprimervotre commentaire perle, dégouline de lui-même, effectivement, comme les mots délicats de René Frégni murmurent infiniment la poésie, transpirent dans cette belle oeuvre -solaire-... sur les chemins provençaux, de Manosque à Marseille, jusqu'à plus loin, jusqu'aux sentes moussues, pierreuses, ravinées, .... là où la vie abonde, s'empresse, foisonne... comme les mots de Pagnol, Giono... si justes, "cherchent à attraper la vie" Frégni raconte les accents pittoresques, la vie de personnages hauts en couleur, cabossés par et avec le temps...il célèbre, évoque les émotions, notre mémoire, nimbées dans et au-delà de la lumière des saisons....
Merci bisak...
Bon après-midi.
Den
....Pardon bizak......
SupprimerDen
Bonjour Den, j'aime bien ce texte; je marche tous les jours. Et cet auteur, je l'ai découvert grâce à toi. Gros baisers de Toulouse, Den!
RépondreSupprimerMerci ma chère Anne... heureuse que tu aimes René Frégni... bonne marche sur les chemins toulousains... je n'ai pas encore pu t'écrire...Gros bisous rendus.
RépondreSupprimerDen
Bonjour je découvre ton blog et j'aime beaucoup ! a bientôt !!! bon mercredi avec du soleil !
RépondreSupprimerLa bienvenue dans mes allées, Nicole... merci pour ton commentaire.
SupprimerBonne soirée dans une douceur toute printanière.
Den