samedi 23 juillet 2016

*Le contraire de un...........................





"Deux n'est pas le double mais le contraire de un, de sa solitude"

***

Je suis éclos de ta plénitude
Sans te laisser vide parce que le vide
Je l'ai emporté avec moi.
Je suis nu, tu m'as couvert 
Ainsi j'ai appris nudité et pudeur
Le lait et son absence
Tu m'as mis en bouche tous les mots
Par cuillerées, sans un : maman
Celui-là le fils l'invente  en battant ses deux lèvres
Celui-là le fils l'enseigne"
(Extrait de Mamm' Emilia)

***

"Arrivé au moment du récit où la lumière fut introduite par le bois et laissée étalée sur ta main  et sur tes cils,
tu m'as regardé droit,  plus sur le front que dans les yeux. (...) Et, à la naissance de mes cheveux où descendait une touche de lumière aussi pour moi, tu pointas une ouverture de sourire à faire fermer les yeux. 
Ainsi tu t'es levée, ta respiration maîtrisée, la mienne coupée (...). Je suis restée un peu. Le coin de lumière à sa place se recouvrait d'ombre. 

C'était en août, il y a bien des années, tu étais une épouse,  une mère d'enfants petits. Ce soir-là (...) nous serrés l'un contre l'autre dans la voiture, toi tu as cherché ma main sous une couverture et tu l'as gardée.
J'ai plissé les yeux pour étrangler le temps. Avec les yeux on y arrive. (...)

J'ai aimé et connu les corps échauffés et pris dans l'enlacement, mais ton geste est un petit drapeau planté 
sur un sommet en plein vent, là où l'on ne peut monter  vers une plus grande intimité, où celle qu'on a atteinte est inhabitable. De là,  il faut descendre. ça je sais le dire maintenant.   Alors, ta main a été la conjonction "et", la particule qui est entre deux noms et qui les accouple mieux  que les étreintes et les baisers. Ta petite main serrée dans la mienne inutilement large, serrée à double tour, nous enfermait tous les deux dedans, tous les autres dehors. 

A l'arrivée, je ne voulais pas la quitter, pas moi le premier, tu devais le faire toi. Tu l'as retirée tiède de caresse, tu l'as remise à sa place, en haut du poignet, du corps séparé. (...) 

J'en ai mis du temps à me répéter que c'était tout, que ce peu-là portait la plénitude de l'entier". 

(Extrait de la conjonction et)

Erri de Luca

Le contraire de un

***




2 commentaires:

  1. Bonjour chère Den, ce texte est magnifique et j'apprécie chaque mot avec le bonheur de ta merveilleuse rose :-)
    Je t'embrasse et toute mon amitié.

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    1. A lire avec délectation, en prenant le temps.. et si on peut, à haute voix.
      Merci Denise pour ton commentaire que j'apprécie.
      Bonne soirée.
      Je t'embrasse.
      Den

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Par Den :
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