"Je préfère le profond, ce qui peut se pénétrer, ce en quoi il est envisageable de s'engloutir, de se dissimuler : l'amour et les forêts, la nuit, l'automne, exactement comme vous. Claquemurées dans la résignation depuis tellement d'années, ses ambitions pour le bonheur - ses ambitions d'adolescente - avaient beau avoir été violentées par la vie, elle les avait ranimées récemment : elle réclamait dès lors de chaque journée qu'elle lui prodigue une minute irradiante, une heure miraculeuse, une enclave d'émerveillement, un grand soupir oublieux des tristesses de l'existence. Malheureusement, la réalité n'est pas tellement généreuse avec ceux qui réclament d'être enchantés. Il ne se passe pas grand-chose d'excitant dans nos vies, vous savez, m'a dit ce jour-là Bénédicte Ombredanne, ce n'est pourtant pas grand-chose ce qu'une femme comme moi peut demander, ce n'est vraiment pas grand-chose et pourtant c'est déjà trop : vous ne pouvez pas savoir à quel point les agréments sont rares dans l'existence d'une femme comme moi. Je me suis remise à y croire dernièrement, en partie grâce à vous, c'est pourquoi nous parlons tous les deux à la terrasse de ce café du Palais-Royal, je me suis remise à espérer qu'un beau matin l'équivalent d'un prince charmant surgira dans ma vie pour m'emporter loin de tout, même momentanément, même si ce prince charmant n'est pas un homme, oui, pas un homme, pas même un être humain, mais une péripétie charmante, un instant romanesque, une éclaircie soudaine et pleine d'espoir, un grand et beau moment d'intensité, vous comprenez ce que je veux vous dire ? Dans la nouvelle de Villiers de l'Isle-Adam, le merveilleux est enfoui dans la roche sous les pieds du voyageur. Il suffit peut-être de savoir regarder un vieux plancher ? Personne ne regarde les vieux planchers, personne ne scrute son quotidien usé avec l'espoir que s'y révèlent une trappe secrète, le démarrage d'un escalier, les ténèbres d'un espace inconnu. Il suffit peut-être de surveiller la surface de son quotidien, d'avoir suffisamment de sensibilité pour détecter l'existence d'un passage, pour identifier la nécessité de s'y faire disparaître ? (Plutôt que de se dire à quoi bon, plutôt que de se dire pour quoi faire, plutôt que de se dire une autre fois, il ne faut pas, ce n'est pas bien, c'est trop risqué, qu'en penseraient les enfants ? qu'en diraient mes collègues, mes amis, les membres de ma famille, s'ils venaient à l'apprendre ?) C'est environné du réel le plus aride que se déploie le merveilleux, voilà ce que murmurent votre roman sur six cents pages"............ (...)
Eric Reinhardt
L'Amour et les Forêts
Que c'est beau, ce texte est magnifique ainsi que ta photo, merci pour ce beau moment douceur! Bise et bon mardi dans la joie!
RépondreSupprimerUn livre fascinant que je suis en train d'avaler avec gourmandise,.... qui bouscule aussi.... un récit poignant .. détonant, surprenant..
RépondreSupprimerqui dit pourtant si bien l'amour de la littérature, de la lecture .... s'y plonger sans modération !!
Merci Maria-Lina pour ta fidélité.
Belle après-midi.
Bisou.
Den
Bonsoir ma chère Den, ce livre soit être absolument prenant. Je prends note!
RépondreSupprimerMerci pour ce beau partage, j'ai lu avec grand intérêt ce beau passage.
Douce fin de semaine avec mes amitiés.
Gros bisous
Merci Denise... avant de m'endormir, je vais lire encore quelques pages... et avancer...
RépondreSupprimerUne douce nuit, si c'est possible.
Je t'en brasse d'ici, étoilée.
Den
Bonsoir Den...Je viens de consulter la médiathèque où il est présent ...j' aurais donc le plaisir de le lire un jour...
RépondreSupprimerMerci pour tout...
De tout plein coeur je t 'embrasse
Ainsi nous pourrons en parler.... Merci Mathilde....
RépondreSupprimeret une très belle soirée.
Bisou.
Den