samedi 27 février 2016

"d'espoir et de lumière.................





"D'aussi loin que je me souvienne, j'ai toujours été hantée par le sens de la vie.
A l'âge de quatre ans je posais à mon père la première question  : Pourquoi ?
Invariablement, sa réponse, quelle qu'elle fût, était aussitôt suivie d'un autre pourquoi ?

Plus que tout, j'ai voulu  que ces choses que l'on dit banales, ces gestes invisibles à l'échelle de l'univers,
ces moments maigres et fragiles qui sont le pollen de nos vies aient du sens, que la plus infime des sensations ne se perde pas dans le néant mais trouve au contraire une direction qui lui donne un relief, lui confère une densité. 
Vivre,  pour moi, a forcément à voir  avec cette capacité que nous avons de créer du sens.

Un soir,  je devais avoir huit ou neuf ans, alors que je me promenais dans la rue avec mon père, j'ai soudainement levé les yeux vers le ciel.
En quelques secondes à peine, j'ai senti se dérouler un fil qui allait du cosmos aux étoiles, puis revenait à la Terre, à la vie sur Terre, aux êtres humains, à mon père et à ma mère, puis à moi, à cette voix en moi qui disait Je. 
Il me semblait que ma conscience naissait à mesure que se déchirait le voile qui me séparait de ce qui n'était pas Je. Devenue l'une de ces poupées gigognes qui s'emboîtent les unes dans les autres, je faisais partie intégrante de ce Tout qui allait de la  chenille aux planètes, des étoiles au brin d'herbe. 
En quelques secondes, l'univers s'est déroulé comme un ruban devant mes yeux d'enfant, et j'ai ressenti un vertige qui contractait mon corps en même temps qu'il provoquait une sensation d'expansion infinie.
Certes, je n'étais qu'une poussière dans ce vaste champ cosmique, mais j'appartenais à cette totalité.
Et cette conscience à laquelle je venais de toucher - cette voix en moi qui disait Je - disparaîtrait un jour, comme tout ce qui naissait allait inéluctablement mourir. 
Je n'étais donc pas le centre de cet univers, j'apprenais que la vie donne et reprend, exalte et broie, et qu'un jour on allait m'enlever ce qu'on m'avait offert de plus précieux, l'existence terrestre.
A ma naissance, une invisible aiguille s'était mise en mouvement. Le temps comptait, je ne pouvais en perdre la moindre goutte. 

Sans doute, est-ce à ce moment qu'un feu s'est allumé en moi, un feu que j'allais mettre plus de cinquante ans à saisir, à maîtriser et, surtout, à aimer.

Poussée par un irrésistible désir  de trouver un sens à chaque chose, je n'ai cessé de chercher avec ferveur,
parfois même avec obstination, à atteindre ce noyau, cette signification de la vie.
J'ai tenté de rejoindre la crête des montagnes abruptes que je gravissais par les flancs les plus escarpés.
Presque naïvement, je voulais que me soit révélé le sens de la vie, que surgisse une figure qui contiendrait des réponses et éclairerait mon existence entière.

J'ai goûté, plus intensément que tout, le plaisir de creuser dans l'opacité des choses pour en extraire l'agencement qui relie des éléments disparates, et duquel émergeait ce qui s'apparente à la conscience.
Comprendre le monde, ou saisir sa beauté, me disais-je, cela ne peut venir que de la perception instantanée d'une ordonnance, d'une figuration du mystère qui semble lever un voile et rendre soudain ce monde accessible. 

Je voulais connaître - saisir et vivre - ce sens que  nous promet  notre naissance, que nous promet l'Amour, 
et qu'attestent les textes sacrés".

Hélène Dorion
Recommencements

***** 

           

10 commentaires:

  1. Que c'est beau, magnifique! Bise et bon samedi dans la joie!

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    1. .....Je savais que tu aimerais Anne.
      Je t'embrasse et pense très fort à toi...
      Heureuse de te retrouver dans les allées de tes mots, de tes beautés... .
      Den

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  3. Hélène Dorion a su mettre en mots nos propres questionnements sur le sens de la vie.. jusqu'au vertige.. jusqu'au rayonnement le plus immense... le plus absolu... dans l'infinitude du temps... pour comprendre... essayer... chercher à atteindre et découvrir la beauté !!
    merci Maria-Lina... à mon tour de te souhaiter un doux week-end...
    Je t'embrasse.
    Den

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  4. Merci ma chère Den de ce magnifique texte d'Hélène Dorion. C'est un texte fort et magnifique. Quel plaisir de l'avoir lu et tes photos sont superbes.
    Je te souhaite une douce fin de dimanche avec toute mon amitié.
    Bisous, Den.

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    1. Merci Denise... Hélène Dorion... on aime suivre ses pas, sur les sentiers de la vie, sur le sens qu'elle lui donne .. la vie en général, comment elle l'élargit, l'agrandit, la sublime... et elle revient ainsi à l'essentiel, l'essence-ciel... ses mots sont justes, lumineux, flamboyants, forts en densité, profonds... comme ses écrits... ils disent le vrai... ils racontent le mystère et l'émerveillement d'être vivants, le monde auquel nous sommes rattachés.... tout en conservant le grand questionnement !
      Je te souhaite Denise un doux week-end à venir.
      Bisous.
      Den

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  5. Une très belle page qui nous porte à réfléchir sur le sens que nous donnons à nos instants si éphémères soient-ils .
    je vais essayer de découvrir cet auteur avec " Sans bord , sans bout du monde " ..
    Bisous Den

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    1. ...Quand elle parle des mots... Hélène Dorion écrit : "J'ai un immense respect pour eux et je trouve douloureux qu'on les malmène tellement de nos jours"... "Les mots sont une petite maison de sens dont il faut prendre soin"...
      La poétesse qu'elle est,continuera son chemin... elle demeure éveillée devant la réalité terre, ciel, vent, l'indéfinissable invisible,et pourtant si sensible noeud des possibles qui permet le souffle inspirant.
      Merci Mathilde de rajouter ton sens au sens.....
      Je t'embrasse.
      Den

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  6. Merci Den pour cet extrait qui est très beau...
    Connaître le sens de la vie, c'est vrai que souvent l'on se dit : cette vie n'a pas de sens, c'est ce qu'écrivais une amie dans la tempête il y a quelques années, et je lui ai répondu à ma manière...



    Tu me dis que la vie n’a pas de sens
    Qu’il aurait fallu lui en donner un
    Que dans ce vaste univers nous sommes sans boussole,
    Comme un bateau à la dérive,
    Ne sachant ni où nous sommes,
    Ni où nous allons…
    Que la musique du monde n’est pas audible…

    J’ai une position, car je le veux
    Petite étoile-vigie
    Disant, je suis là, venez voir,
    Il y a de la chaleur par ici
    Il y a un peu d’espoir,
    Celui de se retrouver dans ce chaos
    Et de ne pas se perdre
    De faire la trace
    De trouver un chemin…
    Dans ces gravats épars
    Il suffit de le vouloir
    Et de se tenir là
    Pour se soutenir

    Donner un sens à la vie…
    Un sens pour que notre vieux monde tourne mieux…
    Mais le monde est fait d’hommes
    Qui tirent la toile dans tous les sens
    Chacun pour lui
    Et Dieu pour personne…
    Quand la toile se déchire, il reste des lambeaux…

    Moi, je pense qu’il vaut mieux donner du sens
    À notre vie
    Se satisfaire de notre place
    Dans la grande constellation
    Petite étoile dans le matin translucide
    Dans les nuits somptueuses
    Qui brille et ouvre sa fenêtre
    Pour respirer cette planète
    Souvent à la dérive
    Retrouver le cap
    Celui de tous les jours
    Dans le bon sens ?
    S’il y a un sens
    Dans le sens de la vie
    Tant qu’il y en a…
    La vie, vous la tenez
    On ne va pas lâcher ce trésor


    Tenir fort la barre
    Et regarder dans tous les sens…
    D’où peut bien venir le bonheur
    Des fois qu’il nous échapperait
    Donner un sens à la vie
    C’est se tenir debout
    Et préserver son rayonnement
    Dans la tempête…

    marine D



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  7. Très beau poème Marine,... merci de nous l'offrir dans les allées de ces mots, reliés à la si belle écriture d'Hélène Dorion qui dit le sens de la vie...
    bonne fin d'après-midi...
    Den

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Par Den :
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