"Dieu est une chose trop importante pour être confiée aux religions"
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Tout l'amour du monde
Tant que je vivrai,
Je chanterai les criquets
Le ciel, les perroquets,
Les baisers, les palmeraies
La gloire des étés
L'appel des toiles cirées
L'ivresse des serments
Les rires des enfants
Le venir de la mer
L'onde des prières
Les baisers de nos mères
Les noces des envers
L'enchantement de tes pas
Rien ne dure ici-bas
Aux vertiges des émois
A la brise qui se noie
Abandonnons-nous, amour
Montons dans les tours
Laissons entrer en nous
Les élans du grand tout
La symphonie des oublis
Le roulis de nos nuits
Croquons les fruits défendus
Que rien ne soit perdu
Ni la chair ni l'effroi
Jusqu'à la prochaine fois.
Depuis que j'ai écrit ce poème, tout a changé dans le monde. Les mots, les aspirations, les technologies. Mais rien n'a changé non plus. Ni le désir d'harmonie, ni les chants des oiseaux, ni les plaisirs des jours. Quand j'ai lu ces vers longtemps après, j'aurais dû, l'âge venant, me sentir dépassé, comme le survivant cacochyme d'une planète morte, à la dérive dans le cosmos. Mais non, je me réveille toujours dans le même état de joie, d'impatience : l'élan vital fait le lien entre toutes les époques. Jusqu'à mon souffle intime, je ne ferai grâce à personne de ma dernière goutte de vie.
Chaque génération croit écrire son épopée sur une page blanche : elle invente un monde que la précédente ne comprend pas et qui sera bientôt recouvert de pelletées de terre par la suivante. Nous sommes des machines à enterrer les morts et à fabriquer de l'amnésie. Nous restons cependant tous semblables, habités par la fureur de vivre, comme les asticots ou les éléphants.
Que sera notre terre dans un siècle ? Dans cinq cents ans ? Y aura-t-il toujours des écureuils pour sauter entre les branches des pins ou des tomates géantes à la peau crevée, répandant leur sang sous les coups de serpe du soleil ? Les pommes dégageront-elles toujours le même parfum acidulé en nous jetant leur jus à la figure dans on les croquera ?
En quelques décennies, j'ai vu notre espèce déserter la nature et se réfugier dans l'entre-soi, le béton armé, les téléphones portables, le chaos morose de la modernité. Autant d'éléments qui l'ont éloignée de Dieu, je veux parler du vrai, celui qui nous accompagne, pas de l'attrape-gogo tyrannique juché sur son trône, qui prétend contrôler les vies, les cerveaux, et défigurer à intervalles réguliers les religions monothéistes.
Quand bien même tout se transmuerait ici-bas, tant qu'il y aura de la vie, il restera toujours l'amour dont Novalis, génie mort à vingt-huit ans,écrivait qu'il l'avait transformé en flamme et que cette flamme consumait peu à peu tout ce qui était terrestre en lui....
Franz-Olivier Giesbert
La dernière fois que j'ai rencontré Dieu
Gallimard (octobre 2018)
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(...)
"Tout ce qui est triste me paraît suspect.
Dieu ne fait pas peur.
Se croire quelque chose est une grande ânerie.
Le grand pêché du monde moderne, c'est le refus de l'invisible.
Heureux d'être. D'être quoi ? D'être, simplement.
L'idée que Dieu pût ne pas être ne m'a jamais seulement effleuré.
Les questions auxquelles on répond par oui ou par non sont rarement intéressantes.
Julien Green
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(...)
"Tout ce qui est triste me paraît suspect.
Dieu ne fait pas peur.
Se croire quelque chose est une grande ânerie.
Le grand pêché du monde moderne, c'est le refus de l'invisible.
Heureux d'être. D'être quoi ? D'être, simplement.
L'idée que Dieu pût ne pas être ne m'a jamais seulement effleuré.
Les questions auxquelles on répond par oui ou par non sont rarement intéressantes.
Julien Green
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Le premier texte que je lis ce matin, est ici, il regorge de mots de tous les jours, mais de ces mots justes et vrais et resplendissants.
RépondreSupprimerMerci Belle étoile
Bises matinales
Merci Bizak d'être venu chez moi ce matin lire les mots de F.O. Giesberg dans son dernier roman... J'ai aimé ce poème qu'il cite et qu'il a écrit il y a bien longtemps, dit-il.... il a écrit ces pages pour nous raconter le roman vrai de son Dieu tout en partageant avec nous les moments où il l’a rencontré. Ce Dieu dont l'existence ne se prouve pas, ne se prouvera jamais !Il a également écrit ces pages pour nous convaincre des bienfaits de la réconciliation entre le cosmos et lui, nous, qu’on appelle le panthéisme. "Il est temps d’en mettre dans toutes les religions. Il les apaisera, les embellira"....
SupprimerMerci à toi cher poète. Tu aimeras ces pages je crois.
Bisou de l'après-midi.
des bisous pour toi ma Den ... J' ai bien fait de passer , je vais le lire tant tes extraits me parlent ... :-)
RépondreSupprimerJ'aimais F.O. Giesberg et j'adore ce livre si joliment écrit où l'on découvre une partie de lui que l'on ne connaissait pas vraiment. Je vais choisir pour vous d'autres extraits que je suis en train de lire et apprécier...
SupprimerMerci Mathilde d'être venue jusqu'ici.
Douce semaine à toi.
J'espère bien qu'il y aura encore des écureuils, des éléphants et des girafes. Des couchers de soleil fabuleux et une mer bleue azur qui caressera les plages. Mais pour cela, il faut cultiver les vraies valeurs et se poser les bonnes questions. Un livre que j'aimerais lire. Merci pour cette suggestion. Bises jurassiennes.
RépondreSupprimerIl faut l'espérer, le croire... voir le verre plein, pas le vide, mais pour cela, et tu as raison, continuer à regarder ce qui est beau, pas les ignominies du monde..
SupprimerOui c'est un livre à lire car il fait du bien.. si tu peux....
Bisous à toi ma chère Dédé, du bout des monts du Jura.
waouh, des mots qui résonnent fort, avec cette fière proclamation "je ne ferai grâce à personne de ma dernière goutte de vie." merci pour la découverte de ce livre
SupprimerMerci Emma d'&perluette....p. 22 : la première fois que l'auteur a rencontré Dieu, "c'était un après-midi d'été, au bord de la Seine, sur une avancée herbeuse. Je m'était endormi près de l'eau, en écoutant la petite musique du clapotis qui troublait à peine l'indolence du fleuve. Quand je me suis réveillé et que j'ai ouvert les yeux, il m'a semblé que j'étais au ciel. Un ciel tout blanc alors que, je m'en rendis compte ensuite, il était bleu marine.
SupprimerJe crois que l'harmonie est blanche comme la joie, le lait, la neige, le coton, les cheveux des vieillards. Ce jour-là elle était si puissante qu'elle m'avait explosé, disséminé en particules élémentaires dans l'infini du monde. J'étais sorti de moi, je ne savais plus où j'étais. Perdu, pour sûr. Disparu, pour ainsi dire. Il me fallut au moins un quart d'heure pour rassembler les morceaux et me retrouver"...............
Bonne soirée à toi.