mardi 9 juin 2020

*L’âme et l’ancolie





Textes, poèmes,et lettres d’intérieur d’auditeurs (semaine 9)


Merci pour ce très bel instant quotidien que nous offrent les lettres d’intérieur depuis le début du confinement. C’est une jolie manière de prendre de la hauteur dans ces temps difficiles




ancolie


"L’âme et l’ancolie 

L’ancolie : Est-ce que les fleurs ont une âme ? 

L’âme : Est-ce que les âmes ont des fleurs ? 

L’ancolie : Des fleurs ? Les âmes ? J’ai entendu parler d’âmes en pleurs, en leurres, en fêlures, alors pourquoi pas en fleurs ma foi ? 

L’âme : Ma foi si c’est une question de foi, et puisque les fleurs ont un cœur, alors pourquoi n’auraient-elles pas d’âme ? 

L’ancolie : Dire pourquoi n’en auraient-elles pas n’est pas dire si elles en ont. 

L’âme : Oui mais c’est déjà quelque chose que de poser la question. 

L’ancolie : Poser une question n’est pas apporter une réponse. 

… On ne pose de questions qu’à des réponses … 

L’ancolie : Qui intervient ainsi dans notre conversation ? 

L’âme : Quelqu’un qui dit quelque chose 

L’ancolie : Qui dit quoi ? 

L’âme : Là, quand tu parles, quoi que tu dises tu dis quelque chose. 

L’ancolie : Même si on ne sait pas quoi ? 

L’âme : On sait toujours même si c’est autre chose que ce que l’on croit savoir. 

L’ancolie : Alors on ne peut jamais savoir si on se comprend ? 

L’âme : On se comprend puisqu’on se parle et se répond. 

L’ancolie : Oui mais si je dis bleu et que tu comprends blanc, on croira se parler quand ce ne sera que du vent. 

L’âme : Ne prends donc pas à la légère les murmures du vent. 

L’ancolie : Tes mots sont jolis mais ils ne sont pas clairs. 

L’âme : Sont-ils sombres ? 

L’ancolie : Non mais tu joues là, quand moi je cherche. 

L’âme : Tu cherches quoi ? 

L’ancolie : Si les fleurs ont une âme, si les âmes ont des fleurs, ce que raconte le vent quand il murmure dans les feuillages. 

L’âme : Si les fleurs sont du vent jeté à nos regards, si le vent a une âme quand il rompt les amarres des navires au repos, si les âmes fleurissent sous l’écho d’un sourire… 

L’ancolie : Oui, tout cela et bien d’autres choses encore… est-ce sans importance ? Que disent les mots qu’on dit de ce que l’on veut dire ? Ont-ils une réalité en dehors de toi, au delà de moi ? 

L’âme : Les mots ne prennent vie que lorsqu’on les prononce. 

L’ancolie : Alors ils n’ont de sens que celui que leur donne celui qui les énonce ? 

L’âme : Non. Ils ont aussi le sens qui convoque celui qui les reçoit. 

L’ancolie : Tu tournes âme, tu brodes, tu voltiges sur les mots. 

L’âme : Je tourne, je voltige tout autour de ta tige fleur, j’erre tout comme toi dans l’air du temps, un petit air de rien du tout dans une des ères de la Terre. 

L’ancolie : L’âme erre ? 

L’âme : Elle ne fait que cela, sur la Terre du moins. 

L’ancolie : Et sur le ciel du plus que fait-elle alors ? 

L’âme : A l’or ? Elle ne fait rien. Sur le ciel du plus l’or est comme l’air, juste un souffle d’ambre dans le collier des ancolies. 

L’ancolie : Juste des lamelles en colis ? 

L’âme : Juste une peau éthique. 

L’ancolie : Juste un désordre de mots ? 

L’âme : Juste des mots-quête 

L’ancolie : Juste des mots que rit le vent ? 

L’âme : Juste une légère brise qui traverse les murs-murs.

L’ancolie : Les murs humains ? 

L’âme : Les murs de l’entendement. 

L’ancolie : Ainsi tu dis âme que les mots soufflent un air qui traverse les murs ? 

L’âme : Oui. 

L’ancolie : Que la parole dit de soi bien plus qu’on ne le croit ? 

L’âme : Oui. 

L’ancolie : Que les mots, toujours, dépassent les pensées ? 

L’âme : Ils les pansent. 

L’ancolie : Ils les blessent aussi. 

L’âme : C’est vrai. 

L’ancolie : Les embrouillent, les emmurent, les divisent, les éclatent. 

L’âme : C’est vrai. 

L’ancolie : Des éclats de pensée ça se fiche dans le cœur. 

L’âme : Dans l’âme aussi tu sais. 

L’ancolie : Alors comment on sait ? 

L’âme : Comment on sait quoi fleur ? 

L’ancolie : Vers quels mots se tourner ? 

L’âme : Je vais te confier un secret. 

L’ancolie : Un secret d’âme ?
L’âme : Non un secret de fleur que les âmes apaisées ont saisi. 

L’ancolie : Un secret de fleur ? Je ne connais nul secret que tu ne saches. Je ne suis qu’une fleur enracinée à la terre qui m’a faite, et si je brille quelques heures c’est juste pour offrir mon cœur aux papillons, aux colibris, et puis je meurs. Je puise dans la terre de quoi étancher ma soif, je m’ouvre au soleil qui me réchauffe et me fait belle, alors les papillons viennent se nourrir de ma sève et tout est dit sur ma vie d’ancolie. 

L’âme : Et voilà, je le savais ! 

L’ancolie : Tu savais quoi ? 

L’âme : Que tu savais. L’ancolie :
je sais quoi ? 

L’âme : Que tu le connaissais le secret. 

L’ancolie : Quel secret ? 

L’âme : Celui que tu viens d’énoncer. 

L’ancolie : Boire la pluie et se tourner vers le soleil c’est un secret ça ? 

L’âme : Oui. C’est même le plus grand des secrets, le mieux gardé. Tout le monde le sait et personne ne le connaît. 

L’ancolie : ????? 

L’âme : Tu te tournes des racines aux pétales vers ce qui te fait belle, tu prends ce dont tu as besoin et tu le restitue en sucs, en miel, au peuple du ciel. Que veux-tu de plus ? Que peut-on espérer de plus ?
L’ancolie : Alors c’est ce que font aussi les âmes apaisées ? 

L’âme : Je crois, oui. 

L’ancolie : Prendre et restituer ? 

L’âme : Se tourner vers ce qui leur fait du bien, et le restituer, oui. 

L’ancolie : Mais je le fais sans y penser. 

L’âme : Tu as bien de la chance fleur, ton instinct te rend sage. Les pensées sont si encombrantes parfois ! Si tu savais toute l’énergie dépensée dans les pensées empesées ! On se fait du mal tant on a envie de se faire du bien. L’ancolie : Ainsi donc le problème des âmes c’est la pensée ? 

L’âme : Oui. 

L’ancolie : Mais une âme qui ne penserait pas ne pourrait plus porter le nom d’âme. 

L’âme : C’est effectivement là tout le problème. 

L’ancolie : Alors les âmes devraient apprendre à cesser de penser ? 

L’âme : Peut-être, oui, en effet.

L’ancolie : Et c’est si difficile que cela ? 

L’âme : Si tu savais fleur ! 

L’ancolie : Es-tu une âme apaisée ? 

L’âme : Et non fleur, je ne suis qu’une âme qui cherche. 

L’ancolie : Qui cherche quoi ? 

L’âme : ……………. 

L’ancolie : Âme ?"

8 commentaires:

  1. Splendide ce dialogue.
    Bien sûr que les fleurs ont une âme...en tout cas les jardiniers le pensent !
    •.¸¸.•*`*•.¸¸☆

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  2. Oui, il est très beau ce dialogue, j'aime beaucoup.
    Merci pour ce partage, Den. Gros bisous.
    PS : j'adore la fleur d'ancolie.

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  3. Une belle poésie pour affirmer haut et fort: les fleurs ont une âme.
    Sinon, comment feraient-elles pour être aussi jolies?

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  4. N'être qu'une fleur.... oui, mais quelle fleur !

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  5. ... J'ai ceuilli l'ancolie au jardin de juin..."
    La suite si tu veux !
    Bisous

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  6. "L’ancolie : Boire la pluie et se tourner vers le soleil c’est un secret ça ?

    L’âme : Oui. C’est même le plus grand des secrets, le mieux gardé. Tout le monde le sait et personne ne le connaît. "

    Je lis ton texte et la pluie commence à tomber dans la lumière d'un soleil endormi...Je vais aller la boire et cueillir la lumière du jour finissant

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  7. Merci chère Den pour ce merveilleux dialogue. Oh oui, les fleurs ont une âme et me mettent le coeur en joie. L'ancolie est une très belle fleur.
    Mon petit bonheur, c'est d'aller voir ces jours-ci la progression de mes lis qui poussent mais sont encore en bouton.
    Doux week-end avec toute mon amitié.
    Bisous ♥

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    1. Merci les Âmi(e)s Célestine, Françoise, Letienne, Marie du Bonheur du Jour, Marine, Marie des Voyages, Denise,.... merci pour vos commentaires qui rajoutent du sens au joli texte-dialogue sur l'âme et l'ancolie.
      Bonne semaine à vous toutes et à toi letienne....
      Amicalement.
      Den

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Par Den :
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