samedi 4 septembre 2021

*C'était il y a longtemps.... dans une petite ville tranquille....où tout le monde se saluait....




"C'était il y a longtemps, dans une petite ville tranquille où tout le monde se saluait, avant.
Dans un pays de collines parfaites et de vergers aux douces toisons de printemps.
C'était au fond du jardin de mon père, qui avait été celui de son père et de son grand-père.
C'était pourtant à une heure matinale inhabituelle, au milieu des pommiers frôlant le ciel encore pâle de la promesse de leurs fleurs prêtes à nouer en fruits.
Quelque chose m'avait alerté. Un bruit de pas.
Je m'étais levé. J'avais vu la large silhouette de mon père se faufiler vers le fond du jardin.
¨Pourquoi s'occuper de ses ruches si tôt ?"

***

(...)





"Mais on était au temps des mots à voix basse et mon père avait plus important à faire,
ce matin-là, que de soigner ses abeilles"....


(...)

"Quel oiseau lève-tôt embrouillait leurs paroles par instant ?...
Je ne m'en souviens pas.

Je me souviens seulement que l'heure était devenue grave tout à coup.
Qu'elle pesait lourd dans leur bouche.
Que les mots s'accrochaient à leurs lèvres comme pris dans les dents d'un peigne.

J'avais encore dans le corps
la légèreté de l'enfance.
Mais d'un coup je me remplissais
du poids de l'homme
et de ses supplices."

***

"Le soleil a atteint le faîte du rucher puis mon front.
L'oiseau tôt levé s'est envolé en faisant s'égoutter les larmes du bouleau, laissant place nette à la tourterelle".

***


"C'était il y a longtemps et pourtant si près du temps d'aujourd'hui, tant les hommes ne cessent de redoubler leurs classes de malheur, toujours recalés à l'épreuve de bienveillance et d'amour.
La même histoire de haine et de rejets, de refus de la différence, de territoires et d'orgueil, de pouvoir, recommence inlassablement autour de nous, faite de l'alphabet de violence et de souffrance dans trop de langues différentes.
S'il fallait la dresser, elle serait longue la liste des conflits qui continuent de séparer des amis de toujours tout autour de la terre !"

Anne-Lise Grobéty
Le temps des mots à voix basse

4 commentaires:

  1. Je ne connais pas ce livre; j'en aime le constat. J vais à la rencontre de cet auteur après avoir admiré ls photos de l'article...Merci!

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  2. Splendide texte qui dit si bien l'absurdité de notre condition : vivre sur une planète où tout était là à profusion, et ne faire que détruire, et se détruire...Encore et encore...
    •.¸¸.•*`*•.¸¸☆

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  3. Merci chère Den pour ce texte de toute beauté. Oui, il a existé ce bon temps.
    Gros bisous et doux week-end ♥

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  4. Une petite ville allemande à la fin des années trente. Deux garçons partagent une amitié profonde, de même que leurs pères. Ils aiment les mots, le rire, les conversations au fond du jardin, près des ruches. Un jour, tout bascule : c'est le temps des mots à voix basse... Ce livre s'impose au devoir de mémoire. Une formidable leçon d'amitié, antidote parfois contre les pires événements de L'histoire.

    Depuis sa parution en 2001, Le Temps des mots à voix basse a conquis bien d'autres pays,..
    d'autres langues.

    Le titre déjà m'a attiré. Je le trouve beau. Le thème, les mots sont à double lecture car ils peuvent être de notre temps, pour d'autres raisons, ou pour les mêmes raisons !


    L'écriture est forte, profonde.

    "Le soleil a atteint le faîte du rucher puis mon front.
    L'oiseau tôt levé s'est envolé en faisant s'égoutter les larmes du bouleau, laissant place nette à la tourterelle".


    "J'avais encore dans le corps la légèreté de l'enfance. Mais d'un coup je me remplissais du poids de l'homme et de ses supplices".

    Là le livre se situait dans une période particulière de grande intolérance qui réprouvait ce qui était différent de soi.

    Cette écrivaine d'origine suisse, je ne la connaissais pas. Je la découvre comme vous. Peut-être que Denise la connaît ? elle a commencé à écrire très jeune, dès 10 ans.... pleine de la conscience qui nous habite, des sujets encore actuels. Je vais comme Anne lire ses autres ouvrages...

    Merci Céleste, Denise et Anne pour vos commentaires.
    Les photos sont celles du jardin de Ber, au printemps dernier ! il était resplendissant.

    Tout cela pour vous dire que finalement je finis par ne plus être trop pessimiste. Je crois qu'une prise de conscience se fait grandissante, et que peut-être nous parviendrons à changer les mentalités, et vivre pour l'essentiel, si le temps compté nous laisse le temps. Je le crois fortement. Trop de personnes ont cette envie. Comment cela pourrait-il en être autr'aimant !

    Je vous souhaite à toutes les trois un heureux week-end. Il fait si beau en ce moment, si doux. Il serait vraiment dommage de ne pas profiter de ce bonheur-là. N'est-ce pas Céleste ?

    Je vous embrasse.

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Par Den :
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